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22 octobre 2016

Tout ce qui n'arrivera jamais - Chapitre 1 : Comme n'importe quel autre jour à bord de l'Enterprise

Chapitre 1 - Comme n'importe quel autre jour

Aux confins de l'espace, comme tous les jours depuis un peu plus de trois ans, l'Enterprise voguait tranquillement vers une destination lointaine. Malgré le temps qui passait et la routine qui s'était installée (heureusement brisée par des missions qui se terminaient parfois de façon inattendue), l'équipage restait professionnel, dynamique et motivé. Les équipes se relayaient jour et nuit pour maintenir le vaisseau en activité et pour que l'exploration ne cesse jamais.

Là, par exemple, alors que de façon très localisée dans l'espace et en synchronisation avec le siège de Starfleet, les horloges digitales affichaient une heure particulièrement matinale, la passerelle était occupée de façon réduite par les lieutenants Sulu et Bailey au pilotage, la Caitiane M'Ress aux communications, le lieutenant Alden aux radars, et le lieutenant Galloway à la sécurité. Le fauteuil était tenu par intérim par Sulu, qui était tout à fait capable (avec l'activité à bord et le plan actuel de vol) de porter les deux casquettes. Car l'Enterprise se dirigeait en facteur de distorsion bas vers la base stellaire XBS-34, affectueusement nommée Xobos, située dans le secteur Praxis, non loin de la Zone Neutre. Là, le capitaine avait prévu de faire une halte afin de permettre à ceux qui avaient demandé une permission de pouvoir se reposer, pendant que le reste de l'équipage rendait visite à un avant-poste scientifique qui étudiait une nébuleuse particulièrement agitée. Le genre de mission qu'affectionnait Jim Kirk, c'était bien connu !

Alors que sur la passerelle, les officiers de service s'ennuyaient ferme (après tout, fixer pendant des heures le vide spatial qui s'emmêlait à cause de la distorsion n'avait rien de divertissant), le docteur McCoy était de permanence pour la nuit avec pour seul patient un tribule qu'il avait inopinément sauvé de la mort quelques années plus tôt. Dans l'infirmerie, comme dans le reste du vaisseau, les lumières étaient tamisées afin de simuler la période nocturne, et il n'y avait que quelques voyants qui clignotaient sur les consoles et les murs. McCoy poussa un long soupir las alors qu'il caressait distraitement la boule de poil juchée sur ses genoux. Être inactif ne lui réussissait pas, et il détestait pour cela être de l'équipe de nuit, mais hé, il fallait bien l'accepter pour que ce ne soit pas toujours les mêmes qui profitent d'un vaisseau vide. Joie. Le médecin poussa un autre soupir, à la limite du gémissement désespéré, et la créature lovée sur ses cuisses poussa un piaillement surpris avant de se rendormir. Avec un air narquois, Leonard se leva de son siège et se dirigea vers une sorte d'aménagement qui ressemblait à une cage à lapin, dans laquelle il plaça le tribule, puis il referma la porte en plexiglas et se retourna vers l'infirmerie désespérément vide.

« Quand je vois ça, je me dis que ça fait un bon bout de temps qu'on n'a pas eu de mission foireuse ou rencontré de problème spatial potentiellement dangereux » s'adressa-t-il (sans trop y croire) au tribule. Celui-ci poussa une sorte de grognement en réponse, mais à cause de son gabarit, cela ressembla plus à un ronronnement qui sonnait distrait et peu concerné, comme s'il voulait indiquer qu'il se fichait bien de ce que le médecin pouvait bien raconter. Bones lui jeta un regard faussement noir avec un sourire en coin. « Ça va, je te laisse dormir. »

Cette petite bête, souvenir de l'affrontement de l'Enterprise contre le redoutable Khan, s'était montrée particulièrement résistante après avoir été ramenée à la vie, et comme Leonard ne pouvait décemment pas faire d'expériences sur Jim, il avait gardé le tribule pour l'observer à la place. Cette décision avait été accueillie par un profond respect pour la logique de la décision par Spock (même si cela ne le concernait pas, mais McCoy avait été certain de voir l'ombre d'un petit sourire amusé sur ses lèvres à ce moment) et un haussement d'épaule perplexe par Jim, qui n'aimait pas bien l'idée d'être examiné via un animal pelucheux et bien trop mignon pour sa dignité d'homme et de capitaine. Un temps, l'idée de baptiser le tribule « Jim » avait été lancée. Spock, une fois encore, n'était pas intervenu, comme si la situation ne manquait pas de le faire s'écrouler de rire ; mais à la vulcaine, donc seulement avec un haussement de sourcil intéressé et une lueur folle dans le regard. Jim (le capitaine) avait refusé avec véhémence, et pour se venger de l'idée, avait décrété que la créature s'appellerait « Leonard », ce que le médecin n'avait pas arrivé à faire changer, son ami étant bien trop buté.

McCoy commença à envisager de traîner sur le net pour s'occuper, quand l'intercom de son bureau bipa. Il rejoignit sa place et activa la communication.

« Passerelle à l'infirmerie. Docteur McCoy ? » fit la voix de Sulu, déformée par le haut-parleur.

« Je vous écoute.

- Nous approchons de Xobos. Nous devrions appareiller dans une vingtaine de minutes. Vous pouvez aller vous reposer, je pense que le capitaine vous voudra avec lui pendant la visite de la base.

- C'est plus que certain » grommela-t-il. Arpenter de long en large une base stellaire avec trois heures de sommeil dans les pattes et un capitaine un peu trop excité de faire une escale, quel pied ! « Merci M. Sulu. N'hésitez pas à venir me réveiller au moindre problème.

- Entendu. Sulu, terminé. »

Le capitaine intérimaire coupa la communication tandis que Leonard se dirigeait vers la pièce attenante à l'infirmerie qui permettait aux infirmiers et médecins de permanence de pouvoir se reposer ou se détendre lorsque le service était calme, comme là. Il allait passer la porte quand il fit une moue résignée, et se retourna pour aller chercher la petite cage dans laquelle dormait paisiblement le tribule. Une fois dans la salle de repos, il la posa sur une table, l'ouvrit et saisit délicatement la petite créature, qui poussa un roucoulement de contentement en sentant les doigts du docteur s'enfoncer dans son épaisse fourrure. McCoy s'allongea ensuite sur l'un des lits, plaça son alter ego à côté de l'oreiller et se pelotonna sur le flanc. Se disant qu'il s'était stupidement attaché au tribule, il se mit à caresser les longs poils chinés, puis il ferma les yeux et, bercé par les ronronnement de Leonard, ne tarda pas à s'endormir.

oOo

L'Enterprise accosta peu après à l'un des ponts d'amarrage de Xobos. Sur la base, l'heure était à peine moins matinale que celle du vaisseau, et personne, à part les détachements de sécurité et les travailleurs de nuits, n'étaient levés. Sulu laissa partir la plupart de l'équipe de passerelle, à l'exception de M'Ress, l'officier en communication. La salle de commandement, déjà calme, devint tellement silencieuse que le jeune pilote s'autorisa à s'avachir sur son fauteuil et à croiser les jambes sur sa console, tandis qu'il naviguait distraitement sur le net, le padd calé sur ses cuisses. Derrière lui, la Caitiane se leva de sa chaise et, le communicateur toujours à l'oreille, vint s'installer à la deuxième console de pilotage, à côté de son collègue. Sulu leva les yeux vers elle et un sourire cordial étira ses lèvres. M'Ress le lui rendit, son expression dévoilant ses canines longues et faisant étinceler ses yeux jaunes. Elle rejeta machinalement derrière son épaule son épaisse chevelure fauve et s'appuya sur la console de navigation.

« Vous prenez une permission, Lieutenant ?

- Hélas, non », répondit Sulu avec un air faussement déçu. « Le capitaine ne souhaite pas que je la prenne en même temps que Chekov. Que ferait-il sans ses deux meilleurs pilotes ? »

M'Ress gloussa en réponse à cet accès de vantardise. Elle savait que Hikaru n'était pas immodeste, mais il aimait parfois faire briller sa position et ses galons avec une plaisanterie de ce genre.

« Vous aviez fait une demande ?

- En fait, non », avoua le jeune asiatique avec un regard malicieux. Puis il passa affectueusement la main sur sa console : « Il faut croire que j'aime trop l'Enterprise pour ça.

- Pourtant, vous avez une famille, je crois.

- Oui, mais elle n'est pas venue sur Xobos. Trop loin et trop proche de la Zone Neutre. Trop dangereux.

- J'ai entendu dire que vous aviez une fille. »

A la mention de son enfant, le cœur de Hikaru se gonfla de bonheur et de fierté. Le sourire aux lèvres, il pianota sur son padd et afficha une photographie où il se trouvait, rayonnant, en compagnie d'une petite fille aux longs cheveux noirs et d'un bel homme d'origine asiatique plus grand et plus massif que le pilote. M'Ress observa longuement l'image, attendrie.

« Elle est adorable.

- Et vous, une famille ? » renvoya Sulu en éteignant le padd.

« Seulement ma mère. Mon père travaillait aux archives de Londres lorsque Khan a... »

Sa voix mourut subitement. L'ambiance détendue et presque amicale qui s'était mise en place sembla se déchirer lorsque la Caitiane avait fait référence à l'horrible attentat à la bombe qui avait causé d'innombrables morts, plus de trois ans plus tôt. Le navigateur toussota, gêné, et retira ses pieds de la console pour prendre une position moins décontractée. M'Ress secoua légèrement la tête en faisant une moue désolée, puis elle se redressa.

« Hum, je vais répliquer du café, vous en voulez ? »

Sulu hocha la tête, un sourire de compassion discrète sur les lèvres. Il tapota ensuite sur sa console, vérifiant l'état des propulseurs, des nacelles, et la quantité restante de carburant, tandis que la Caitiane s'approchait d'un renfoncement dans le mur. Elle entra un code sur le boîtier digital qui s'y trouvait, et une porte coulissa pour donner accès à un réplicateur. Là, elle entra sa commande. Elle revenait vers Sulu avec une tasse de café chaud quand celui-ci leva les yeux dans sa direction.

« Lieutenant, contactez le centre de commande de la base et demandez leur la permission de remplir nos réservoirs.

- Oui, capitaine.

- Et prévenez-les que l'équipage quittera l'Enterprise vers neuf heures, heure locale.

- A vos ordres. »

Chacun une tasse en main, ils reprirent leurs occupations. M'Ress passa les communications demandées, tandis que Sulu planifiait le plan de vol vers la station scientifique qu'ils devaient visiter après l'escale.

oOo

Il était à peine sept heures (heure de l'Enterprise) lorsque les portes coulissantes de la passerelle s'ouvrirent sur Kirk et son fidèle maillot or. Sulu et M'Ress avaient laissé leur place à l'équipe de matin depuis un peu moins d'une heure et ce fut avec un entrain très professionnel que le capitaine salua Chekov et Uhura avant de s'installer sur le fauteuil de commandement. Le jeune russe lui résuma le voyage et les actions de Sulu durant la nuit, et l'officière en communication lui rapporta les demandes qui avaient été faites à la base en matière de ravitaillement. Satisfait, Jim enclencha plusieurs boutons sur son accoudoir et s'adressa à son équipage (du moins ceux qui étaient de service, le message étant enregistré pour ceux qui dormaient).

« Bonjour à tous, ici le capitaine Kirk. Nous sommes arrivés dans la nuit à la base stellaire XBS-34 pour notre escale. Un quartier libre est accordé à l'ensemble du personnel, à l'exception de l'équipe réduite de ce matin. Nous quitterons le pont à quatorze heures pour rejoindre la station scientifique Azure X. Ceux d'entre vous à qui il a été accordé une permission peuvent d'ores et déjà quitter le vaisseau. En outre, pour toute demande d'importance, vous pouvez utiliser la fréquence Thêta pour joindre le Lieutenant Uhura. Kirk, terminé. »

Jim coupa la communication puis, comme s'il avait été piqué, s'éjecta de son fauteuil pour se diriger vers le turbolift. Les portes allaient se refermer quand il se retourna vers la passerelle.

« M. Chekov, je vous laisse l'Enterprise.

- Oui, Capitaine. »

Mais celui-ci avait déjà disparu dans l'ascenseur.

Après avoir passé plus de trois mois dans l'espace sans point d'attache, Jim était particulièrement excité à l'idée de marcher sur autre chose que le revêtement poli des couloirs du vaisseau. Pas qu'il n'aimait pas l'Enterprise, loin de là (certains s'amusaient à le dire marié à elle), mais un changement d'environnement n'était jamais refusé, surtout s'il pouvait briser cette routine vicieuse qui s'était installée pendant la mission quinquennale. Jim aimait l'espace : il pouvait passer des heures à observer le vide sidéral, les étoiles lointaines, les nébuleuses et les poussières de comète, quand ses navigateurs ne voyaient qu'une bouillie mixée par l'effet de distorsion. Mais il n'y avait pas de repère dans l'espace, pas d'heure, pas de sol, pas de gravité. Garder les pieds sur terre était difficile, et Starfleet avait précisé dans les closes de son programme d'exploration que l'Enterprise devait faire des haltes régulières à des stations ou des bases pour changer d'air. Et pour cela, même si l'escale était courte, Xobos était parfaite.

A peine plus récente que Yorktown, une base devenue célèbre pour les prouesses techniques et technologiques dont elle était capable, XBS-34 était très bien équipée, et ressemblait à une sorte d'île paradisiaque au milieu du silence de l'univers. La plate-forme était construite sur une trentaine de niveaux parallèles à ciel ouvert, hérissés chacun de tours et d'immeubles de verre et traversés en tous sens par les trains et les lignes d'ascenseurs. Au sommet, une superbe construction en forme de dôme se trouvait être un stade qui pouvait accueillir des événements aussi divers que des rencontres sportives, des opéras, des ballets ou des concerts, ceux-ci étant retransmis en direct par hologrammes depuis les lieux lointains où ils étaient joués.
Tout en bas en revanche, une multitude de corridors et de ponts s'étoilaient telles les ramifications d'un arbre, ou plutôt de ses racines, et au bout de chacun d'entre eux, un vaisseau était amarré. Au plus près du premier niveau, on pouvait apercevoir plusieurs centaines de patrouilleurs dévoués à sécuriser la base, puis venaient ensuite les invités : nefs scientifiques, diplomatiques, navires de croisière, et des œuvres plus importantes comme la célèbre Enterprise de Starfleet.
L'ensemble de la base, à l'exception du spatioport, était enfermé dans une immense sphère qui simulait tous les aspects environnementaux de la Terre, que cela soit la luminosité en fonction de l'heure de la journée, ou la météorologie (par mesures économique et écologique, la pluie, la neige, le brouillard et la grêle étaient holographiques et non réels), ce qui en faisait une destination privilégiée au sein de la Fédération.

Pressé de parcourir les larges boulevards ensoleillés de la base, Jim retrouva à la salle de téléportation principale un McCoy luttant contre l'envie de s'endormir debout et un Spock dont l'ombre de la commissure droite de sa bouche ne cessait de tressauter, ce que Jim identifiait comme étant l'expression d'une agitation particulièrement forte, certainement à l'idée de découvrir Xobos (ce qu'il comprenait très bien), et ils furent rapidement envoyés au niveau administratif. Le reste du personnel, ceux qui avaient le temps de batifoler et de se promener, devraient prendre des moyens de transport plus classiques. Les trois officiers se matérialisèrent dans une pièce arrondie tellement plus vaste et novatrice que celle qu'ils venaient de quitter que Jim pensa qu'il valait mieux que Scotty ne la voie pas s'il ne voulait pas que l'ingénieur se mette littéralement à baver d'envie sur les circuits complexes et les consoles certainement plus performants que ceux de l'Enterprise (qui se devait être plus nomade et donc moins gourmande en énergie). Ils furent alors accueillis par un groupe d'hommes et de femmes humains et extraterrestres portant des uniformes divers : l'un des hommes était un amiral de Starfleet, un vieux bonhomme rabougri qui avait certainement dû penser faire sa dernière affectation à la frontière avant de prendre sa retraite sur la base ; un autre était un représentant du Cabinet de la Fédération et son insigne diplomatique luisait sur sa veste impeccablement repassée ; et l'une des femmes, la seule sur laquelle se posa le regard de Jim, était une magnifique créature blonde au visage sérieux, aux yeux bleu glace, et à la taille merveilleusement fine. Et elle portait un uniforme formel d'officier tactique, aussi, mais c'était nettement moins intéressant à regarder. Avec un sourire et un regard charmeur, Jim lui adressa un signe de tête poli, avant de saluer la délégation. L'amiral proposa alors aux trois explorateurs de déjeuner en leur compagnie, invoquant l'honneur de recevoir à sa table si célèbre équipage, mais on pouvait entendre à sa voix que le protocole l'emmerdait profondément et qu'il aurait préféré bouffer un sandwich seul en regardant une chaîne d'holotélévision divertissante plutôt que de parler sciences, navigation et politique avec des jeunots qui ne connaissaient rien à la vie. Jim sentit son ressentiment comme si on lui avait craché aux pieds mais il accepta la proposition à grand renfort de tout autant d'honneur, et il sentit l'amiral se braquer, ce qui lui valut un regard désapprobateur de la part de Bones. Ensuite, le représentant du Cabinet leur fit un résumé, tandis qu'ils quittaient les lieux pour une salle de réunion, de la situation spatiopolitique de la frontière et des potentiels dangers s'ils s'aventuraient trop loin dans la Zone Neutre. Par chance, la station scientifique qu'ils devaient visiter était très au large des régions sensibles, la présence de la nébuleuse dissuadant les empires romuliens et klingons de s'y aventurer. Il expliqua ensuite que les résidents de la station Azure X n'avaient plus envoyé de relevé ni de réponse aux messages depuis plusieurs semaines, et Jim flaira immédiatement les problèmes.

Par la suite, le groupe se disloqua. L'amiral indiqua à ses invités où se trouvait sa salle de restauration, puis il quitta la pièce avec la plupart de la délégation, ne laissant derrière lui plus qu'un vice-amiral andorien affreusement laid et la jeune femme blonde que Jim avait repéré plus tôt. A eux d'eux, ils symbolisaient les extrêmes de la beauté, pensa-t-il avec un sourire amusé. Le vice-amiral s'approcha d'eux et désigna son accompagnatrice.

« Je vous présente le Commandeur Sana, qui est arrivée sur la base il y a quelques jours sur l'USS Excalibur. »

Jim lui tendit la main pour la saluer, mais la jeune femme resta immobile et se contenta de lui adresser un signe de tête poli. Un peu gêné, le capitaine reprit sa position initiale en feignant ajuster sa tenue.

« Il est rare de voir un officier tactique supérieur sans son vaisseau, Commandeur », commenta-t-il dans une volonté de détendre l'atmosphère.

« L'Excalibur est en cale sèche », répondit Sana d'une voix plate et mesurée.

« Un problème ? Vous avez essuyé une attaque ?

- Non. »

La jeune femme jeta un coup d'oeil au vice-amiral, passa la pointe de sa langue sur ses lèvres en baissant le regard, et quand elle le ramena sur Jim, celui-ci était certain que ses pommettes s'étaient colorées d'un truc entre le bleu et le vert. Il identifia cette émotion comme étant de l'embarras (Spock réagissait étrangement de la même manière dans les mêmes circonstances).

« En vérité, à cause de nos nombreux récents voyages à travers différentes nébuleuses actives, il semble que la coque de l'Excalibur se soit oxydée. N'ayant pas de mission prioritaire dans l'immédiat, j'ai décidé de le laisser en maintenance sur la base. »

Jim plissa les yeux, la bouche entrouverte, n'étant pas certain de la véracité des paroles de Sana. Un regard au visage de Spock le convainquit de lui faire confiance, mais il restait tout de même un peu incrédule.

« Vous êtes en train de me dire que la coque a rouillé ?

- En quelque sorte, oui. »

Kirk resta quelques instants bouche bée, avant que McCoy ne le ranime en l'appelant discrètement, et il cilla en tentant de reprendre une attitude plus correcte.

« Wow. Euh, pardonnez-moi, j'ignorais qu'un vaisseau pouvait rouiller dans l'espace.

- Il semblerait que cette situation soit plus courante que vous ne l'imaginez, Capitaine », intervint Spock de sa voix grave et calme. « Vous vous basez sur une fausse croyance humaine, illogiquement fondée sur l'hypothèse que l'espace est vide d'atomes, ce qui n'est pas le cas. Et il est tout à fait scientifiquement possible qu'une exposition prolongée à des éléments moléculaires favorisant l'oxydation du métal fasse apparaître ce que vous appelez en langage vernaculaire, de "la rouille".

- Merci, M. Spock... », répondit évasivement Jim, l'air d'avoir été perdu au milieu de l'explication de son Premier Officier.

Le vice-amiral s'éclaircit la voix et reprit la parole : « Quoi qu'il en soit, le temps que l'Excalibur soit remis en état, le commandement de Starfleet a pensé que vous pourriez accueillir à votre bord le Commandeur Sana. Je crois que vous avez reçu un message à ce sujet. »

Jim se figea une nouvelle fois. Il se souvenait très bien du bandeau de Starfleet en tête du message, très reconnaissable, qui indiquait que son contenu était officiel, mais il était à peu près certain d'avoir lu en diagonale le texte, après les termes d'usage, les salutations et les rappels des titres et affectations des destinataires. De ce fait, il avait évidemment oublié qu'une partie de l'équipage de l'Excalibur embarquait sur l'Enterprise pour remplacer ceux qui étaient en permission sur Xobos. Cela permettrait aux hommes du premier vaisseau de gagner de l'expérience en découvrant le fonctionnement d'un autre navire, et à ceux du deuxième de pouvoir compter sur des systèmes opérationnels en cas de coup dur. Kirk s'efforça bien entendu de ne pas montrer qu'il avait été pris de cours et il sourit très diplomatiquement.

« Tout à fait. Nous vous avons réservé des quartiers sur le Pont D, Commandeur. Vous pouvez vous installer dès que vous le souhaitez, l'équipage sera ravi de vous y conduire à votre arrivée.

- Je vous remercie, Capitaine. »

Le vice-amiral et Sana les saluèrent une dernière fois, puis ils se détournèrent et quittèrent la pièce. Jim attendit que les portes coulissantes se soient refermées pour pousser un gémissement désespéré et agacé.

« Bon sang ! J'avais complètement oublié !

- Capitaine, je vous suggère de parler moins fort, l'ouïe des Vulcains est bien plus développée que celle des Humains. »

Décontenancé par les paroles de son Premier Officier, Jim se calma mais fronça les sourcils, se demandant si Spock faisait une telle requête car il lui cassait les oreilles en criant, puis il comprit en se rappelant soudain de ce qu'il avait lu dans le message de Starfleet.

« C'est vrai, elle est Vulcaine ! »

McCoy serrait les paupières pour chasser la fatigue quand il entendit ces mots. Il se redressa et adressa à Jim un regard alarmé.

« Attends, tu veux dire qu'on va avoir à bord un autre foutu gobelin au sang vert ?

- Docteur, je dénote dans votre ton -

- Elle est jolie. » Jim haussa un sourcil malicieux en adressant à son ami un regard entendu, coupant court à un débat qu'il savait perdu d'avance. McCoy eu la finesse d'esprit de ne pas renchérir et de détourner l'attention du Premier Officier de ses mots précédents :

« J'ignorais qu'il existait des Vulcains blonds.

- Elle est certainement originaire des contrées polaires de Vulcain. Le Commandeur Sana présente toutes les particularités physiques de la province de Pohr'Ka. »

Leonard hocha la tête pour montrer qu'il assimilait l'information, même s'il était à peu près certain qu'il aurait oublié le nom de la région quelques minutes plus tard. A côté, Jim s'approchait d'une console de conférence munie d'un ordinateur, située face à l'immense table ovale de la salle de réunion, et pianota sur le clavier digital. Après quelques instants, la figure pâle et les traits nobles de la jeune Vulcaine apparurent sur l'écran. Jim fit la lecture de la fiche :

« Le Commandeur vulcain Sana, de son nom complet S'tak T'lan Sana, est née à Tahrkama, en Pohr'Ka sur Vulcain en 2235. Elle a passé l'examen d'entrée de Starfleet en candidat libre à Edimbourg, en Ecosse sur la Terre en 2253 et a intégré la filière tactique comme élève officier. Elle s'est spécialisée au court de ses études en pilotage et combat naval, et a reçu des formations complémentaires en reconnaissance terrestre, combat au corps à corps et en diplomatie, avant de passer l'examen facultatif au commandement. Brillamment diplômée en 2257, elle est immédiatement promue au grade de lieutenant-commandeur et affectée sur l'USS Excalibur comme Premier Officier du Capitaine K. T. Ejrka. Elle lui succède deux ans plus tard lors du décès prématuré de ce dernier et mène avec succès pléthore de missions diplomatiques, lui permettant de recevoir les médailles de...

- Je crois qu'on a compris », le coupa McCoy en poussant un soupir. « On a encore à faire avec un petit génie aux oreilles pointues, visiblement.

- Il est tout à fait curieux, Docteur, que le Commandeur Sana, avec ses résultats, ait choisi un poste de tacticien. Il n'est pas dans la nature des Vulcains de ne pas adhérer aux sciences.

- Et bien, je suppose que vous pourrez lui demander ses raisons. »

Jim éteignit l'ordinateur puis se redressa pour regarder ses compagnons, mais c'était plutôt à son second qu'il s'adressa :

« On doit aller visiter quoi, maintenant ?

- En priorité, le laboratoire qui recevait les relevés de Azure X, puis je pense qu'il serait avisé de rendre visite à l'école élémentaire de la base. Le commandement de Starfleet et le Cabinet de la Fédération pensent que cela permettra de motiver les enfants de rencontrer un capitaine tel que vous. »

Kirk toussota, un peu gêné par ce compliment inattendu, puis il fit signe à ses amis de le suivre et il quittèrent la salle de réunion.

oOo

Le déjeuner protocolaire avec l'amiral de la base avait été diplomatiquement une réussite, mais socialement désastreux. Jim n'avait pas cessé de s'empêcher de soupirer et de répondre à grands coups de sarcasmes au ton critique et mécontent de leur hôte, qui semblait à peu près convaincu que le capitaine de l'Enterprise ne méritait pas tous les éloges qu'il avait pu entendre jusque-là.

Le repas terminé, il était temps de préparer le vaisseau pour le départ, et Kirk, Spock et McCoy ne tardèrent pas à rejoindre le spatioport de la base. Ils croisèrent en chemin tous ceux qui prenaient leur permission sur place, et qui firent exprès (Jim en était certain) de les narguer avec leurs tenues civiles, et les doigts de pied en éventail au bord des bassins et des lacs artificiels des jardins et des parcs. Au moment d'embarquer à bord de l'Enterprise grâce au ponton, cette fois, ils virent Chekov, qui venait tout juste de finir son quart, sortir en courant un sac sur le dos, visiblement pressé de rejoindre les autres.

Enfin, Jim rejoignit la passerelle et, après un compte-rendu rapide de la matinée auprès de l'officier qui avait pris la place d'Uhura, s'installa sur son cher fauteuil de commandement avant d'ouvrir une communication sur l'ensemble du vaisseau, comme il l'avait fait quelques heures plus tôt. Au même moment, Spock sortait du turbolift en compagnie de Sana.

« Ici le Capitaine Kirk, votre attention s'il vous plaît. Comme vous avez dû le voir, nous accueillons pour notre mission sur la station Azure une partie de l'équipage de l'USS Excalibur qui est actuellement en maintenance. Ils assureront les quarts de ceux qui prennent leur permission sur Xobos. Durant notre mission, vous aurez parfois l'occasion d'être dirigés par le Commandeur Sana, capitaine de l'Excalibur, j'attends de vous la même spontanéité et le même professionnalisme que d'ordinaire. Kirk, terminé. »

Jim coupa la communication, puis, tandis qu'il demandait au navigateur de vérifier que tout était prêt pour le départ, il quitta son fauteuil pour rejoindre Sana. Celle-ci lui adressa une expression qui ressemblait à un sourire poli, et il se demanda comment il avait fait pour ne pas voir plus tôt qu'elle était Vulcaine, même si elle semblait cacher ses oreilles dans les boucles de ses cheveux blonds. D'une manière néanmoins étrangement différente, elle paraissait tout aussi émotionnellement réservée que Spock, mais son regard bleu clair, par contraste avec les orbes d'obsidienne de son Premier Officier, semblaient briller avec plus d'ardeur et plus... d'humanité.

« J'apprécie votre volonté de me faire participer au commandement, Capitaine », dit-elle avec un mouvement de tête gracieux.

« Je pense que ce sera une expérience intéressante pour vous comme pour moi.

- En effet.

- Vous êtes-vous installée dans vos quartiers ?

- Oui, dans la matinée. Votre équipage a été très attentionné. »

Jim se félicita mentalement d'avoir pensé à prévenir l'Enterprise de l'arrivée du personnel de l'Excalibur. Par la suite, il échangea quelques mots avec elle et Spock au sujet de la mission, alors que la passerelle retrouvait son activité habituelle. Puis le pilote annonça le départ, et Jim rejoignit son fauteuil. Devant lui, l'espace sembla se tordre et se fondre en une masse sombre striée de lignes blanchâtres, et bien malgré lui, un sourire étira ses lèvres. Oh, il détestait visiter des stations scientifiques autant que les missions diplomatiques, mais il était toujours là, dans l'espace, au milieu de nulle part, avec cette immensité si vide et si silencieuse, tout ce noir piqueté d'étoiles, au-dessus, de toutes parts, et il voguait là plus librement que n'importe qui. Et c'était ça qui comptait, chaque jour qui passait.


Fait parodique utilisé : "L'Enterprise développe un mauvais cas de "rouille de l'espace" et doit passer la plupart de l'épisode en cale sèche avec des peintres se demandant comment faire sécher de la peinture dans l'espace."

Ne voyez aucun self-insert dans le personnage de Sana. Je reprends seulement un personnage que j’avais créé il y a quelques temps et duquel je me suis inspiré aussi pour créer ce blog.
P’is de toute façon, j’aime pas les self-insert D:

Allez, j’espère que ça vous a plu. A bientôt !

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